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Les habitants des HLM des Chênes paient le prix de la densité

Une nouvelle fois à Saint-Malo un permis a été délivré pour construire sur les « espaces verts » d’un ensemble de HLM. Après Bellevue, la rue Alain Porée ou la Louisiane… la liste de ces espaces communs supprimés, totalement ou partiellement, dans les secteurs HLM ou les quartiers s’allonge.

Les arguments utilisés sont toujours les mêmes. Le premier argument , « il faut densifier pour ne pas consommer les espaces naturels agricoles », est parfaitement vérifié par les études, en France et particulièrement en Bretagne (l’une des régions françaises qui consomment le plus de foncier). Quant au second, « c’est pour augmenter la population de Saint-Malo »  , la stratégie qui consiste à le lier intimement au premier, pour qu’il hérite au moins en apparence de la même solidité scientifique, est une escroquerie (intellectuelle) au regard de ce qui serait efficace.

La nouvelle affaire dont nous ont fait part des Malouins est comparable à ce qui s’est déjà produit ailleurs à Saint-Malo, comme permettent de le constater les nouveaux outils d’observation mis à disposition par le site gouvernemental Géoportail. Elle a également une caractéristique bien particulière, le montage de l’opération entre un bailleur social et un promoteur.

Les lieux et le projet


Cette opération se situe en plein centre de Paramé, entre la rue des trois frères Ruellan et le parc des chênes, où une soixantaine d’appartements ont été construits dans les années 1960. Les deux barres de logements bénéficient d’un espace intérieur, protégé de la rue, constitué de places de stationnement, de 1800 m² d’espaces verts, très moyennement entretenus, (41 m² par logement) et une surface consacrée à des fils à linge (700 m²).

Aiguillon veut construire 20 logements et 20 places de parking en réduisant à 500 m² l’espace commun (hors des pieds d’immeubles) soit à peu près de 6 m² par logement…

Un montage particulier

Si les logements sociaux prévus par Aiguillon construction (constructeur et gestionnaire de logements sociaux) vont occuper l’espace central de l’îlot, cette opération ne se limite pas à ceux-ci. Elle fait partie d’un programme plus vaste de construction de logements privés du groupe Lamotte, auquel appartient la SACIB, qui construit 38 logements privés à côté. Mais l’opération du groupe ne pouvait être réalisée sans bénéficier d’une partie des espaces extérieurs des H.L.M. actuels et de l’un de ses accès.

Le groupe Lamotte et Aiguillon se sont donc entendus et ont déposé un permis unique portant sur les deux opérations, pour Aiguillon 20 nouveaux logement HLM et pour le promoteur 38 logements privés.

Cette décision d’associer les deux dossiers a peut-être des justifications liées à l’efficacité, mais il interroge également sur le nombre de logements sociaux produits au final.

La construction des logements d’Aiguillon compris dans le même permis de construire que celui du promoteur exonère apparemment ce dernier d’en produire dans sa propre opération. Au regard des objectifs de production de logements sociaux, ce montage permet à ce promoteur moyennant un accord, qui n’est transparent pour personne, d’échapper à cette obligation en comptabilisant les logements sociaux produits par Aiguillon dans son opération. Or ce dernier, pouvait difficilement construire d’autres types de logements sur ces terrains subventionnés par l’argent public et amortis par plus de quarante ans de loyers des locataires.

Densité où et pour qui ?

Pour nous, l’urbanisme est d’abord la façon d’organiser la ville en fonction des critères humains que les décideurs souhaitent mettre en avant. Il ne se réduit pas à la notion d’aménagement tel que le pratiquent certains élus et les promoteurs. La compréhension de cette notion parfois complexe est aujourd’hui facilitée par les outils à notre disposition. Dans notre cas, une carte et trois couches de données permettent de répondre aux questions, de la densité où et pour qui ?

Le site Géoportail a reproduit les données de l’INSEE sur la base de carrés de 200m de côté dont les couleurs changent en fonction des critères. Par exemple, la densité varie de très faible en bleu, à forte en brun.

C’est l’illustration de ce que nous expliquons depuis plusieurs années, en construisant sur les espaces verts des ensembles HLM, la densification est réalisée dans les secteurs les plus denses où les niveaux de vie sont les plus bas et la population la plus jeune.

En pratiquant de la sorte pour faire de la place à des constructions dont un tiers est destiné aux résidences secondaires :

  • Quel est le gain réel de densité ?
  • Est-ce une façon de faire payer le prix de la densité à ceux qui ne peuvent payer des loyers du secteur privé dans Saint-Malo ?

Et les locataires actuels ?

Dans ces conditions, on pourrait espérer que les négociations qui ont consisté à vendre des droits de passage et un terrain qui a été financé par les aides publiques, la solidarité nationale et les loyers payés par les locataires bénéficient au moins aux locataires.

Malheureusement cela semble mal parti.

En effet Aiguillon construction a mené une concertation à la mode « malouine des six dernières années », c’est-à-dire une concertation sur un projet ficelé. À tel point, que les locataires ont été réunis en juin dernier, le lendemain de la signature de l’autorisation du permis de construire par la mairie alors que le dépôt de la demande datait de plusieurs mois.

Ensuite, le projet est implanté de telle façon qu’il réduit à une peau de chagrin les espaces extérieurs de jeux et de détente, leur préférant les places de stationnement des nouveaux logements. On peut d’ailleurs remarquer que si Aiguillon a vendu du terrain à Lamotte/Sacib qui réalise des stationnements en sous-sol, cela n’a pas contribué à financer ce même équipement en sous-sol des logements HLM, pourtant cela aurait préservé l’espace commun en surface.

Pour compléter le tableau

Comment qualifier l’hypocrisie qui consiste a présenté en même temps que le dossier des nouvelles constructions, la mise en état des espaces extérieurs ou les travaux de ravalement et de performance énergétique ? Comme si les travaux de rénovation dépendaient de la réalisation de cette opération. Les logements ont maintenant plus de quarante ans, une opération HLM est généralement bénéficiaire au bout de trente ans, il est de toute façon temps de réhabiliter.

Par ailleurs, les locataires qui financent chaque année dans leurs charges les espaces extérieurs n’ont pas entendu parler de diminution des charges auxquelles 20 locataires supplémentaires contribueront pour une surface réduite de moitié.

Un dernier souhait

Lors d’une éventuelle demande de garantie d’emprunt pour laquelle la commune serait sollicitée pour cette opération, nous espérons que les élus auront l’idée de consulter les habitants et de faire en sorte que ce dossier soit respectueux de leurs espaces communs.

Enfin, pour ce qui est de l’espoir n’exagérons rien…

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